Bien que le hip-hop soit tout d'abord investi par un milieu masculin, les femmes ont apporté, notamment dans la musique, un renouveau côté lyrique, mais aussi en termes de flow et de sujets abordés dans les chansons. Ainsi, elles sont peu à peu parvenues à se faire une place, malgré une infériorité numérique flagrante.
En revanche, l'image des femmes dans le paysage du rap est, de manière générale, peu flatteuse, en regard de certains clips musicaux où celles-ci apparaissent souvent en tenue légère, faisant ainsi ressortir un important sexisme. Ceci est d'autant plus flagrant dans le hip-hop Mainstream dont les clips passent en boucle à la télévision et jouent essentiellement sur des images et des stéréotypes sexistes et même misogynes.
Pour illustrer la place des femmes dans le Rap d'aujourd'hui, voici le portrait d'une icône du Rap Français, Keny Arkana.
Née le 20 décembre 1982 à Boulogne-Billancourt au début des années 80, Onora Dafor jeune femme d'origine argentine vit une jeunesse difficile au sein de foyers d'où elle fugue régulièrement. C'est cet environnement qui la verra écrire ses premiers textes. Elle commence à rapper en 1996 et tire son inspiration auprès de ses illustres ainés, tels Assassin ou encore NTM.
A la fin des années 90, le rap marseillais vit ses plus belles heures avec, entres autres, l'effervescence de la Fonky Family. Onora, débarquée dans la citée phocéenne, ne tarde pas à s'infiltrer et rejoint l'Etat Major, un collectif underground qui lui permettra de se faire connaitre du public marseillais à travers de nombreux concerts, mix-tapes et émissions de radios. C'est à ce moment là, que celle qui se faisait appeler Keny, appose derrière le nom d'Arkana en référence au personnage de la série "Les Mondes Engloutis".
Rappeuse, mais aussi aventurière, elle décide alors de voyager et parcourir le monde.
Evoluant en solo depuis 2003, elle se présente l'année suivante pour la première fois devant le public de la capitale, en effectuant les premières parties de Dany Dan et Sinik, et lance réellement sa carrière en 2005 en enregistrant L'Esquisse.
Déjà des portes s'ouvent, des majors la courtisent, mais c'est finalement Because Music qui enregistrera sa signature.
Une annéé s'écoule. Entre Ciments Et Belles Etoiles, son premier album, est fin prêt et gage déjà de la maturité de ses textes. S'en suivent des premières parties de Manu Chao, des concerts dans les festivals comme les Eurockéennes de Belfort et Désobéissance un EP en guise de piqure de rappel, à la suite duquel Keny Arkana décide de reprendre son sac à dos et de s'envoler une nouvelle fois vers de nouveaux horizons. Elle ressent le besoin de s'aérer mais surtout de s'éloigner de cette notoriété grandissante qui ne lui convient pas.
Il lui faudra alors trois années pour revenir et se replonger dans sa musique. En 2011, le deuxième volet de sa mix-tape L'Esquisse 2 voit le jour suivi de Tout Tourne Autour Du Soleil en 2012.
Le 27 mai 2016, Keny Arkana sort un nouvel EP intitulé État d'urgence, distribué à prix libre au format numérique. Cet EP est un album écrit à la suite des attentats du 13 novembre 2015.
Keny revient avec L'esquisse 3, sorti le 2 juin 2017. S'en suit alors une tournée des festivals durant l'été 2017 avant un retour en studio pour l'album Exode, prévu pour la rentrée 2018.
Les textes, plein de rage, sont très contestataires à la fois contre les institutions françaises, le FMI, les politiques, mais également sur la vie en Amérique du Sud, où elle a passé une partie de son existance. Keny se veut engagée et intègre, n’hésitant pas à interpeller directement son ancien directeur de centre de redressement pour l’insulter (Eh connard !).
On a ainsi affaire à un album varié, qui prend soin de ne jamais se répéter d’un titre à l’autre, fort de ces minuscules peaufinages qui font que chaque écoute se révèle nouvelle et différente.
Le flow de la rappeuse est, le plus souvent, rude et rapide, ce qui correspond bien avec la dureté des textes. Mais, sur certains titres il sait se faire plus mélancolique lorsque le thème le nécessite, voire carrément dépressif sur «Le fardeau». Sur d'autres morceaux, sa voix posée fait presque penser à du slam.
L’album sent fortement le vécu, rempli d’anecdotes sur son enfance et sa jeunesse, laissant percevoir la forte personnalité que dégage la rappeuse.
Après plusieurs écoutes, on se rend également compte que derrière le discours révolutionnaire, Keny offre également une vraie philosophie de vie, pleine d’optimisme, et d’espoir, invitant chacun à profiter de sa vie et de sa liberté.